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MES AVENTURES AVEC HOWARD |
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F in 1991, Howard Rheingold en avait terminé des 2 ans de travail qui lui avaient permis de publier La réalité virtuelle et il venait de « vendre » à l'éditeur Addison-Wesley un nouveau projet de livre sur l'histoire et l'état actuel de la télématique. Dans le cadre de la préparation de ce nouvel ouvrage, il souhaitait rencontrer des interlocuteurs ayant participé à l'aventure télématique dans différents pays étrangers, notamment le Japon, l'Angleterre et la France. Une connaissance commune, Gérard Poirot, consultant spécialisé dans la télécommunication et membre français de l'Electronic Networking Association, lui avait indiqué mon nom et celui d'Annick Morel, qui avait travaillé avec moi à CalvaCom. À cette époque, j'étais installé comme traducteur-rédacteur depuis 3 ans (et il se trouve que c'est Annick qui, juste avant notre départ de CalvaCom, m'avait donné l'idée de renouer avec mon ancienne spécialité), je tenais une chronique dans Univers Mac et si j'avais continué à être très actif sur les forums de CalvaCom pendant 2 ans, je commençais à ressentir une certaine lassitude vis-à-vis de ces échanges électroniques qui semblaient revisiter toujours les mêmes débats répétitifs... Cela dit, dans l'esprit de l'objet qui nous amenait à nous rencontrer, Howard et moi passâmes d'abord plusieurs mois à correspondre par messagerie électronique (CalvaCom disposait d'une passerelle de messagerie Internet qui me permettait de correspondre avec le service télématique californien d'Howard, The Well). Nous savions donc déjà que nous avions vécu pas mal de choses en commun et que nous avions des opinions assez proches lorsque nous nous rencontrâmes enfin, lors d'une visite d'Howard à Paris au printemps 1992. Howard rend compte de nos discussions au chapitre 8 de son livre, Les Communautés virtuelles. Parallèlement, Annick et moi étant traducteurs anglais-français, il semblait tout indiqué que nous entreprenions la traduction du précédent livre d'Howard. Je dois dire que bien plus que la télématique, dont j'étais un peu lassé à ce moment-là, la révélation grâce à Howard de cette nouvelle spécialité, la « réalité virtuelle », qui semblait tout droit sortie d'un des livres de science-fiction que je dévorais depuis l'âge de 8 ans, allait marquer toute mon année 1992 : en janvier, je me rendais au MICAD 92 assister à la conférence/démonstration de Robert Stone, pionnier anglais de la discipline et j’y rencontrais Jean Segura, LE journaliste spécialisé en France (et au cocktail de clôture, Sean Gourley, qui y distillait ses standards de jazz, mais ceci est une autre histoire !) ; en février, je me passionnais pour IMAGINA 92 et les écrits inspirés de son producteur, Philippe Quéau ; en mars, je me plongeais avec délectation dans les actes complets de ce salon ; en avril et mai, je consacrais pas moins de deux chroniques au phénomène dans Univers Mac ; en juillet, j'entamais avec Annick la traduction du livre d'Howard sur le sujet... et ainsi de suite, jusqu'en décembre, ponctué par une conférence et des démonstrations au Centre Georges-Pompidou par un autre pionnier américain de la discipline, Scott Fisher. Howard et moi avons continué de correspondre et lorsqu'il eut achevé son ouvrage, baptisé The Virtual Community, à la fin 1993, je fus assez naturellement amené à le traduire en français, avec l’approbation amicale de Philippe di Folco, qui dirigeait les éditions Addison-Wesley France à cette époque. Outre le contenu — un excellent travail de reportage et de recherche qui m’a appris beaucoup sur la généalogie d’une discipline que j’avais pratiquée — j’ai goûté la position un peu incongrue (et probablement assez rare ;) dans laquelle j’étais de traduire un ouvrage dont quelques pages m’étaient consacrées et à l’index duquel je figurais ! Et cette drôle de tentation furtive, en une ou deux occasions, de traduire une phrase d’Howard me décrivant avec des mots légèrement plus flatteurs en français ! ;o) Pratiquement en même temps que la parution des Communautés virtuelles, en janvier 1995, je découvrais le Web, qui me faisait d’emblée — comme à tout le monde probablement — une impression extraordinaire, du même ordre que celle que m’avait faite la présentation du concept de tableur lors d’une démonstration de VisiCalc sur Apple II, en 1981 à l’American College in Paris. Howard avait déjà réalisé une ébauche de site Web qu’il avait baptisé « Brainstorms » et m’avait proposé de lui envoyer de petits reportages, me conseillant de me procurer un appareil photo numérique QuickTake 100 d’Apple, dont le prix venait de baisser. De mon côté, j’avais suffisamment programmé pendant mes années Calva, sur Apple II, sur Harris et sur Tandem pour m’intéresser d’emblée au langage HTML et pour avoir envie de m’amuser à bricoler avec. En définitive, je lui ai fait parvenir les deux reportages reproduits ici à l’identique (Internet in France: Year Zero et Cyber Cafés are in Season), je me suis bien amusé et cela m’a donné le prétexte idéal pour explorer le monde naissant du Web en cette année 1995. Le début 1996 a, lui, été l’occasion de vivre en direct la naissance d’une communauté virtuelle autogérée... et les psychodrames américano-libertaires correspondants ! The Well, lui-même partiellement autogéré par ses abonnés, venait de connaître une crise et une partie de ses abonnés avait décidé de faire sécession et de créer une nouvelle communauté. Pour prolonger la métaphore aquatique déjà productive (The Source, l’ancêtre des services télématique, puis The Well = le puits), ils décidèrent de la baptiser The Spring (le torrent). Pendant un mois ou deux, j’ai assisté et discrètement participé aux débats constituants, à des discussions interminables et tatillonnes sur les institutions à fonder, les mécanismes de vote, les contre-pouvoirs qu’il faudrait instituer, etc. Lorsque je décidai de m’éclipser, toutes ces questions n’étaient pas encore résolues et je ne sache pas qu’elles aient trouvé de réponse depuis, en tout cas du côté de ce torrent. ;) Sans doute éclairé aussi sur les limites de ce modèle à ce moment-là et de toute façon porteur depuis quelques mois d’un projet propre, Howard s’attelle alors à la mise en œuvre de celui-ci, qu’il baptise Electric Minds. Se considérant à juste titre comme un « pollinisateur » d’idées, conforté dans son rôle de promoteur et d’expert ès communautés virtuelles par le succès de son livre Virtual Communities, il a relativement peu de mal à réunir une équipe d’amis motivés et compétents autour de lui et à lever des fonds pour son entreprise. Electric Minds prolonge à une échelle nettement plus ambitieuse les initiatives qu’Howard avait lancées sur son propre site Web, Brainstorms (débats d’idées) et Rheingoldian Roadshows (reportages d’amis à travers le monde et comptes-rendus de voyages personnels). Après quelques mois de préparation, le site ouvre en octobre 1996, avec reportages et forums répartis en 4 sections : Virtual Community Center (tout sur les communautés virtuelles et leur développement), Edge Tech (techniques d’avant-garde), Tomorrow (que nous réserve l’avenir ?) et World Wide Jam (le « bœuf » mondial). Dans cette dernière section, qui systématise le principe des correspondants dans une douzaine de grandes métropoles mondiales, Howard nous a demandé, à Annick Morel et à moi, d’animer la sous-section « Paris », c’est-à-dire d’en gérer les forums et d’envoyer des reportages. (Cette première version d’Electric Minds a été partiellement archivée ici par sa directrice de production, Abbe Don.) J’ai d’excellents souvenirs de ces quelques mois de grande communion internationale très stimulants. Nous avions vraiment l’impression de participer à une nouvelle étape de développement de cette « intelligence collective » entraperçue par les pionniers qu’évoque Howard dans Les Communautés virtuelle et qu’en France, le philosophe Pierre Lévy commençait à théoriser avec souffle et talent. Les quatre reportages présentés ici sont ceux que j’ai effectués pour Electric Minds(1 - Le Web Libération, 2 - Education nationale et Internet, 3 - Minitel et arnaque, 4 - BNF et grands travaux). La première phase d’Electric Minds ne dura que 8 mois. Le temps tout de même d’être cité parmi les 10 sites Web de l’année 1996 par Time et d’intéresser plusieurs dizaines de milliers de participants. Un des enseignements de l’aventure, c’était qu’il n’existait toutefois pas encore de modèle économique viable pour une telle activité. On peut cependant regretter que le principal investisseur, Softbank, ait jugé bon d’interrompre l’expérience si rapidement. Après deux reventes entre 1997 et 2000, Electric Minds existe toujours et est désormais pratiquement autogéré, sous la supervision de deux fondateurs historiques qui se sont impliqués le plus dans cette renaissance. De son côté, Howard continue de « polliniser » sous divers modes : ses forums Brainstorms et ses reportages sont toujours actifs sur son site, et il les a complétés d’un pan d’activités professionnelles : sous sa nouvelle enseigne, Howard Rheingold Associates, entouré de spécialistes amis de longue date, il propose à toute entité intéressée l’élaboration intégrale d’un projet de création de communauté virtuelle. Il continue également d’écrire des livres et a publié l’année dernière une édition révisée de son ouvrage Tools for Thought, qui exposait dès 1985 l’histoire de l’informatique et les perspectives que l’émergence de l’ordinateur personnel ouvraient. |
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![]() Printemps 1992 De g. à d. :Lionel, Howard, Jérémie qui cache sa mère Gena Hall Lumbroso, Mamie sur les genoux de sa mère Judy Maas Rheingold et Annick Morel. |
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Les illustrations de cette page sont des reproductions de tableaux d'Howard Rheingold. Cliquez en haut de la page sur son visage ou son logo pour visiter son site Web. |
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