Episode One 1970-1977
Rocking Seventies

Ça, c'est une photo qui date du début 1970, j'étais en Terminale au Lycée Carnot, et les deux copains qui y figurent avaient été rencontrés à Carnot, comme un certain nombre des protagonistes de cet « Épisode Ouane ». ;) Au premier plan, il y a Gilles Peltzer, à la guitare, puis moi à la basse Höfner de mon frère Philippe (« forme violon comme McCartney ! »), et au fond, le grand frère Rémi Peltzer à la batterie.

Mon frère Philippe a 2 ans de moins que moi, mais en piano classique comme en « rock-blues-jazz », il avait plus de facilités et c’est lui qui a commencé à jouer en groupe (de la basse), carrément dès 13-14 ans, avec quelques contrats à la clé, notamment une mémorable soirée au Royal Monceau (avec Jean-François Favart à la batterie) où il fallait voir ces jeunes de 14 ans en smoking ou costume divertir de leurs standards de rock jazzy une assistance bien plus âgée ! (Je crois qu’il en existe encore une ou deux photos et j’essayerai de les retrouver , c’est « trognon ». ;)

Gilles, Rémi et moi répétions dans la cave de chez mes parents, qui allait servir à cet usage pendant une paire d’années avec d’autres copains. À ce sujet, la lettre ci-contre, envoyée à mon père par le syndic de l’immeuble est fort piquante et savoureuse à la relecture. ;)

 

La bande des 4 et celle du 15e

En 1971, j’étais souvent fourré avec mes trois meilleurs copains de l’époque, Dominique Sportiche, Gilles Seban et Sylvain Schreiber, avec qui j’avais été en classe à Carnot. J’étais en première année de fac de médecine (de mon point de vue, ça voulait dire « enfin libre ! » ;) et eux étaient déjà en Math Spé. On fumait des joints ensemble, on écoutait Hendrix, on en finissait plus de discuter de tout et de rigoler de bon coeur, notamment aux mimes drolatiques de Sylvain.

Par le cousin de Gilles, Michel, qui habitait dans le 15e, avenue Félix-Faure, on avait établi le contact avec une bande sympathique de ce grand immeuble moderne où l’on retrouvait les soeurs Marienneau (Corine et Elisabeth) et bien d’autres. On ne faisait pas encore de musique, dans ce groupe, mais on en écoutait beaucoup !

 

Ma rencontre avec Louis

Au printemps 1972, un ancien copain de lycée, Isi, m’emmène à une boum d’anniversaire (je crois) et je note tout de suite ce garçon aux cheveux noirs un peu en bataille, assis sur ses genoux sur un tapis au fond du salon, avec une guitare, et qui joue et chantonne des chansons des Beatles, des Stones, des Who, de Led Zep, etc. Que des trucs que j’aime aussi, et joliment interprétés ! On discute, on sympathise et on convient de se revoir pour faire de la zique ensemble.

Aussitôt dit, aussitôt fait dans les jours qui suivent, et comme nous le pressentions, le courant passe très bien. Louis évoque le copain qu’il a rencontré l’été précédent en Angleterre et qui s’appelle Lionel aussi : il pourrait tenir la guitare rythmique.

À titre anecdotique, il faut savoir que Lionel Blévis (c’est son nom) se targue depuis 30 ans d’avoir été « celui qui a appris à jouer de la gratte à Louis Bertignac » ; hé hé hé, plus ou moins vrai, plus ou moins faux, c’est quand même un trait qui continue de nous faire sourire tous les trois encore aujourd’hui. ;o)

Bon, il ne reste plus qu’à trouver un batteur. Je ne sais plus comment ça s’est fait, par relation ou par annonce, mais nous avons rencontré Bernard Drouillet, avec qui le courant est bien passé et qui a fait partie du groupe pendant un an et demi.

 

interlude : et la musique ??

Vous vous dites que tout ça, c’est bien joli, mais ça fait beaucoup de mots et pas une seconde de musique pour l’instant ?

Il va falloir qu’on fasse temporairement un saut jusqu’en 1975 pour trouver un enregistrement. C’est seulement vers cette date que j’ai commencé à enregistrer assez régulièrement les boeufs, répètes, etc.

Ici, il s’agit d’un blues en 12/8 improvisé à 3, avec mon frère et Louis.


Remarques générales sur les extraits musicaux :
1 - Le titre du morceau fait office de lien. Il est suivi du débit requis pour de l’écoute temps réel, du volume du fichier et de la durée du morceau. Si vous n'avez pas une liaison rapide (câble ou ADSL), téléchargez les morceaux.
2 - Pour télécharger un morceau et l’écouter à loisir en local, faites un clic-droit (sur PC) ou un Ctrl-clic (sur Mac) sur le lien et choisissez l’option d’enregistrement.
3 - Sur Macintosh, si QuickTime efface cette page, ouvrez le TdB Réglages QuickTime, volet Module du Navigateur, bouton Réglages MIME, développez MP3 et choisissez "QuickTime Player" pour les fichiers audio MP3.
4 - Ce sont ici des bœufs, d’il y a longtemps, donc n’espérez pas entendre de la zique impeccable techniquement et « artistiquement » ! ;)

1975 – Blues à 3 improvisé (Mono 64 kbit/s, 4,2 Mo, 9’10")
ou bien
Extrait pour goûter (310 ko)

Guitare claire : Louis Bertignac
Guitare soft : Philippe Lumbroso
Basse & chant : Lionel Lumbroso

À Noter :
Lou débute l’exposition, Phi reste discret (ce qui n’est pas mon cas ;) avec un joli accord glissé à 26" et dialogue brièvement en fin de grille (1') avec Lou. Grille 2: Pas de solo, Lou et Phi tissent de façon soudée. Grille 3 : Personne ne prend de solo entre 2'10" et 2'40" — ça arrive en improvisation — mais Phi se décide à mi-grille de fort jolie façon et passe très bien la main à Lou (3'30") qui fait un solo vif et enlevé. Grille 5: On bat les doubles croches pour changer et Lou résout élégamment. Grille 6 : Rechangement d'ambiance, Phi prend un solo. Grille 7 : Solo de basse avec belles nappes des 2 guitares en fin de grille. Grille 8 : Couplet de chant mi-anglais mi-yaourt ! 8'40": Coupure de courant pour 1 ou 2 instruments ! On s’arrête là, mais à l’époque, on a dû continuer encore 10 minutes comme ça après le retour du jus, on était pas facilement arrêtables !

 

1972-1973 : Le groupe « 1ère époque »

On n’avait pas de nom, on éprouvait pas le besoin d’en avoir, mais après quelques répétitions, on était prêt à jouer notre répertoire de reprise des Stones, des Beatles, d’Hendrix, de MC5, de standards de rock, etc.

Je ne sais plus qui, d’entre Louis, Blévis ou Bernie, obtenait les engagements — je ne crois pas en avoir démarché un seul —, mais nous en avions régulièrement, genre un ou deux par mois, pour des fêtes de lycée (Balzac, Henri IV, etc.), municipales (Mairie du VIe), dans des clubs, etc. D’un autre côté, je crois que nous n’avions pas encore compris qu’on pouvait se faire payer pour ça, on était trop content de pouvoir jouer. ;o)) On peut penser que ça a joué pour favoriser la régularité de nos engagements (autre explication possible : les trois autres m’ont bien arnaqué ! ;)

J’avais une bonne voix taillée pour le rock et le blues, je faisais donc bassiste-chanteur, Louis était déjà le guitariste soliste émérite et créatif qu’on connaît, et Lionel Blévis assurait une grosse rythmique et — bonus qui nous enchantait — il avait vraiment la tête et la dégaine de Keith Richards ! ;)

Rien n’a été enregistré, aucune photo prise, mais le groupe s’est reformé, au batteur près, en 1995 pour une occasion spéciale avec enregistrement que j’évoque en fin de page.

 

1973-1974 : « Korange » avec Jean-Louis

À la rentrée de septembre 1973, Blévis, qui est tout de même un garçon sérieux, estime qu’il doit mettre les bouchées doubles à la fac Dentaire et qu’il ne peut plus se permettre de jouer dans le groupe. Il nous faut un remplaçant.

Louis reprend contact avec un copain guitariste connu à Carnot, Jean-Louis Aubert (qui débarque avec son copain Olivier Caudron, on en reparlera dans Épisode Deuxième). Le courant passe tout de suite, Jean-Louis a les mêmes goûts que nous, il assure une rythmique solide et funky, et c’est reparti pour une saison qui nous voit progresser et devenir très soudés.

(Pour l’anecdote, Jean-Louis change de surnom en nous rejoignant : "Loulou", qu'utilisait sa famille et ses proches, est déjà pris chez nous pour Louis, alors on le surnomme "P'tit loup". Moi, c'est "Yoyo", bien sûr, mais je n'aime plus trop qu'on me le rappelle. ;->)

On répète souvent dans l’usine de blanchisserie que gère le père de Louis, Joël Bertignac, au milieu de grands chariots remplis de ballots de linge propre ou à laver, dans les odeurs de lessive variées, les jours où l’usine est fermée.

On commence à s’occuper un tout petit peu de promotion ; un copain de Bernard, le batteur, croque nos portraits à l’encre ; j’ai retrouvé ci-contre ceux des 3 autres, mais pas le mien, snif ! On cherche un nom ; je propose « Korange » : l’orange est une des grandes couleurs des années 70, ça lorgne un peu sur le nom du groupe « Ange », numéro 1 français à l’époque, mais en y ajoutant la notion de « corps », plus un « K » qui fait « roK ». Cela dit, ces justifications intellectuelles n’empêchent pas que le nom n’est pas terrible ! Lors d’un concert au parc floral de Vincennes (pour une fête bouddhiste !), lorsque l’animatrice « dans le vent » nous présente en disant « Et maintenant, voici le groupe pop Korange ! » avec plein d’enthousiasme un peu niais et forcé (mais... professionnel, merci à elle tout de même ;), nous sentons bien que ce nom craint. Comme disait Jean-Louis, « ça fait vraiment trop boisson gazeuse, comme nom ! ».

Au début 1974, le courant ne passe plus trop avec Bernie et nous recourons jusqu’à l’été à 2 autres batteurs, Jean-Guillaume Cattin, qui fait du jazz et est fort trapu, et Richard Kolinka, que Louis vient de rencontrer. Un de nos derniers engagements de la saison a lieu au très chic Pavillon d’Armenonville, à l’occasion d’un « rallye » de la jeunesse bon genre Neuilly-Auteuil-Passy, avec Richard. J’ai des extraits (mal) enregistrés de ce concert, mais le souvenir qui domine, c’est le décalage total entre ces jeunes bien mis dans la salle et nous qui étions peut-être à notre plus « rockers mal élevés ». On a alignés nos numéros stoniens et généralement hard sans aucune concession vis-à-vis du lieu et de l’occasion, et ça a probablement été vécu comme une catastrophe dans la salle, mais comme un grand moment de rock pour nous, hé hé hé.

 

interlude : bœuf à Tolbiac pendant la grève de 1976

À part cette prestation discutable du Pavillon d’Armenonville, je n’ai pas d’enregistrement du groupe. Néanmoins, l’extrait ci-dessous donne une assez bonne idée de ce que nous faisions et de la cohésion qui régnait entre nous trois. C’était en 1976, nous n’avions plus de groupe ensemble — Jean-Louis faisait ses classes de pro avec Valérie Lagrange, Louis et Corine avec Shakin’ Street — mais nous continuions à fréquenter la même bande et à bœuffer très souvent ensemble.

Là, l’occasion, c’était la grève de 1976 à la fac Tolbiac. On avait débarqué avec nos amplis et nos guitares, et on avait trouvé un batteur sur place. D’autres copains nous avaient accompagnés, on distingue un Hervé au chant et je me demande encore si le regretté François Dinant assurait la 3e guitare ou pas, mais même si c’est le cas, on ne l’entend pratiquement pas.

J’ai fait débuter cet extrait tout à la fin d’un rock standard parce qu’on distingue bien combien on pouvait enchaîner comme un seul homme sur autre chose sans concertation : le funk qui va durer près d’une demi-heure (la cassette s'est arrêtée avant !) débute par 3 notes quasi à l’unisson de Louis et moi, avec Jean-Louis qui embraye dans le quart de seconde qui suit !

C’est une impro et il y a des longueurs (le fait qu’il y ait eu un chanteur sans qu’on l’entende vraiment contribue à ces longueurs), mais c’est notamment une occasion assez rare d’entendre Louis déployer sur 20 minutes toute la palette de ces solos assez étonnants. Je donne des indications de minutage dans le « À Noter » pour ceux qui veulent aller à l’essentiel. Et puis vous pouvez toujours continuer à lire l'histoire en laissant tourner le bœuf. ;)

1976 – Tolbiac Funk (Mono 64 kbit/s, 9,6 Mo, 20’50")
ou bien
Extrait pour goûter (380 ko)

Guitare rythmique : Jean-Louis Aubert
Guitare solo : Louis Bertignac
Basse : Lionel Lumbroso
Batterie : X (qui peut se faire connaître s’il le souhaite et s'en souvient ;)
Chant : Hervé X (qu’on entend mal)

À Noter :
Début très coordonné à 26", rythmique funk conjointe Loulou/P'tit Loup. 1'45 : Louis commence à passer des riffs. 2'30" à 3'10", chant. 3'10": Louis démarre un solo de façon à la fois contenue et décidée, Jean-Louis dope son riff funk vers 3'45" et Louis poursuit son récit en le faisant monter jusqu'à 4'30". (À 5'15", notre ami batteur se laisse un peu emporter, mais tout rentre dans l'ordre. ;) En dehors de quelques belles phrases de solo de Louis avec réponses de JL vers 6'20" et 7'50", rythmique et rap jusque vers 9', avec petit changement d'ambiance vers 8'20" initié par la basse. À 9'15", Louis demande d'une phrase un changement et JL et moi le suivons d'emblée. À 9'30", il part pour un solo d'1'30" très enlevé et très construit (comme d'hab ;) avec gros soutien de JL, et réclame en sortie vers 11' un changement d'ambiance que je soutiens en allant jouer dans l'aigu pendant 20" avant de revenir dans les basses. Louis repart de façon très contenue à 11'30", se repose sur une note pendant 10 secondes à 12', puis repart *très* fort (saute d'enregistrement à 12'35", désolé) avant qu'on convienne tous de baisser, baisser, baisser vers 13'. J'aime bien le fait qu'à 2 reprises dans ce passage, à 13'27" et à 13'44", Jean-Louis et moi faisons quasi exactement la même phrase, rythmiquement et mélodiquement, au même moment ; l’écoute mutuelle entre nous trois est vraiment forte et notre batteur de rencontre se coule plutôt bien dans cet esprit aussi. On sort du passage doux vers 14'50", le batteur accompagne bien la montée en puissance et en tempo qui suit et, de mon côté, j'accentue aussi en alternant basses et aigus et... on se retrouve en rock rapide vers 16'-16'30" (un peu longuet jusqu'à 17'10"). Louis a un bon départ de solo vers 18'10" jusque 18'50", puis repart bien de 19'25" à 20'05". À la fin, le batteur et JL favorisent un changement et Jean-Louis relance un autre riff rageur à 20'30". Ma cassette s'arrête, mais nous, on a bien dû continuer 5-10 minutes !

 

Grands espaces USA et les Loulous passent pros

L'été 1974 est une saison charnière : à la rentrée, les 2 Loulous vont aller faire leurs armes de guitaristes professionnels, l'un avec Jacques Higelin (et Simon Boissezon, pour « BBH 75 »), l'autre avec Valérie Lagrange. On marque le coup en entreprenant un fabuleux voyage aux USA à 2 fois 2 (« fabuleux » n’est pas ici galvaudé : avec Louis, on reparle régulièrement de ce voyage de 2 mois 1/2 qui nous a marqué à vie ;). Je pars avec Louis, et Jean-Louis part avec Olivier (Caudron), mais nous convenons de nous retrouver à intervalles pendant le voyage (ce sera New York/Bronx, 2 semaines, Berkeley, 1 semaine). Louis et moi sommes sac au dos, guitare à la main, on passe la première nuit à l’hôtel, la *seule* du voyage. Pour le reste, on trouvera toujours à être hébergés et on fera du stop d’une côte à l’autre and back. Un de ces jours, j’essaierai de faire un récit pas barbant de ce trip extraordinaire.

 

Corine et les 3 bonnes fées

À un moment, je ne sais pas si c’était en 72, 73 ou 74, j’opère la jonction entre les deux bandes, celle de mes 3 anciens potes et du 15e, et celle du groupe de musique. Gilles Seban, à qui je demandais récemment s’il se souvenait des circonstances de cette jonction, m’a dit, « je crois que c’était pour un plan de shit ». Si non è vero, è ben’ trovato ! [PS 25/01/2002 : Corine confirme que ça s’est passé à l’été 1973, que Louis et moi cherchions à fumer et que je pensais que ses amis d’Issy-les-Moulineaux pourraient nous dépanner !]

Corine, comme tout le monde, s’est vu distribuer des bonnes cartes et d’autres moins bonnes : des rapports difficiles et douloureux avec sa famille mais une grande sensibilité et, entre autres, trois « bonnes fées » au masculin (comment dit-on ? des enchanteurs ? ;). C’est d’abord mon frère Philippe qui lui apprend la guitare et la trouve douée, puis Alain Broda qui lui offre une guitare basse Eko forme violon, et enfin Louis qui lui trouve le sens du rythme (elle fait aussi de la batterie !) et l’encourage à la basse avec d’autant plus d’efficacité qu’il se passe aussi quelque chose entre eux sentimentalement.

Les circonstances de sa première montée sur scène valent d’être contées : courant 1975, Louis et moi jouons au Festival de Bièvres, avec Richard à la batterie je crois (et Olivier ?), on s’est déplacé en bande, Corine est là, François Ravard aussi. À un moment sur scène, ma bouche touche le micro pendant que mes doigts sont sur les cordes de basse : Zzzzzinnng, il fait noir, je reste conscient mais je suis, littéralement, « à la masse » ! Les autres me raconteront après que je suis tombé et que Louis — merci mon pote ! — a donné un grand coup de latte dans ma basse pour me décrocher ! Je suis sonné, je peux continuer à chanter mais pas à jouer : Corine prend la basse pour la suite du concert et elle joue « The Pusher » pendant que Louis lui souffle les accords dans l’oreille !

 

1975-1976 : Vie en communauté à Saint-Cloud

Entre temps, une communauté se forme dans une grande maison de Saint-Cloud située au bord de la voie ferrée. On y retrouve notamment Louis, Corine, mon frère Philippe, Alain Broda et bien d’autres. Il y a même ma petite cousine Juliette, en fugue à 15 ans, qui rejoint ce havre baba. L’organisation des « tâches » et la cohabitation à une douzaine posent quelques problèmes, comme probablement dans toutes les communautés, mais on s’y réunit souvent et on fait beaucoup de musique et beaucoup d’expériences.À cette époque, on continue aussi à bœuffer régulièrement dans le grand appartement de mes parents (toujours très accueillants, qu’ils en soient ici remerciés !).

Pour ma part, outre une participation active à ces agapes, je rencontrerai bientôt le talentueux et chaleureux pianiste carcassonnais Michel Rousset avec qui je ferai la saison d’été 1975 du Club Méditerranée à Yasmina, au Maroc, comme bassiste. Au nombre des rencontres musicales heureuses de cette époque, il y a aussi celle de Lucien « Zabu » Zabuski et de son complice Laurent Grangier (et de Pierre-Yves, et d'autres encore !) à l'excellente fac d'Anglais Charles-V (Paris VII) où nous étions inscrits.

Retrouvez la musique originale de Laurent et Zabu (lors d'un boeuf à 4 avec Michel Rousset) et un mini-récit du temps passé avec eux, en cliquant ici.

1976-1977 : Téléphone et les autres

Téléphone débute sa formidable aventure à l’automne 1976 comme on le sait. Pendant un certain temps, cela ne change rien à la cohésion de notre large bande : nous allons en groupe soutenir les premières prestations de nos copains et nous continuons à nous voir et à jouer régulièrement.

Les 3 chansons que je vous propose ci-dessous datent d’avril 1977 et ont été enregistrées avec Louis une après-midi chez mes parents.

La première est une de mes compositions de cette époque au piano (j’écrivais encore mes chansons en anglais, trouvant que c’était plus facile ! ;). J’ai laissé en début de séquence un petit dialogue entre Louis et moi parce que, de façon amusante, Louis me dit qu’il souhaite cantonner sa grille de solo au couplet et qu’il s’agit que je reprenne le chant au refrain, alors que dans le feu de l’action, il va y aller sans problème, sur le refrain ! Puisque le couplet de solo, de façon tacite, était de longueur libre, ça donne d’ailleurs l’occasion de voir encore combien Louis sait annoncer clairement un changement de passage et combien nous sommes constamment à l’écoute l’un de l’autre pour rester ensemble.

1977 – Time for a Change (Lumbroso) (M 64 kbit/s, 2,6 Mo, 5’43")
ou bien
Extrait pour goûter (380 ko)
Bonus : ouvrir une fenêtre avec les Paroles

Guitare : Louis Bertignac
Piano & chant : Lionel Lumbroso

À Noter :
Premier couplet, puis 1er refrain à 1’05", pendant lesquels Louis reste discret. Il souligne opportunément la transition qui va de 1'20" à 1'40" puis se fait un peu plus présent lors du second couplet. Refrain à 2'15". Début du solo à 2'35". Louis fait monter sa sauce progressivement de façon habile et construite ; il monte en puissance à partir de 3'35", tandis que je réprime mal un chantonnement monocorde partiellement audible qui m'aide à m'associer à sa montée; je sais que le moment d'enfourner le refrain approche, j'ai complètement oublié ce qu'on s'est dit au début, il est évident que la guitare ne peut pas s'arrêter là et j'embraye immédiatement sur le signal clair de passage que nous donne Louis à 4'12" en poursuivant son super solo. Au sortir du refrain, je passe au motif de fin, sur lequel Louis brode avec goût et vivacité.

En 1977, Louis, moi, et bien d'autres avons été fortement marqués par la sortie de « Songs in the Key of Life », produit par un Stevie Wonder qui semblait être au sommet de son art. Nous avions déjà adoré ses disques précédents et je reprenais souvent au piano et au chant des grands tubes comme Living for the City, You haven’t done nothing ou d’autres.

Sur le dernier disque, j’avais notamment relevé, outre I Wish, Talk with God et As/Always, que nous reprenons ici. C’est l’occasion pour Louis de faire vivre, pleurer, crier sa guitare de façon assez marquante !

1977 – Talk with God (S. Wonder) (Mono 64 kbit/s, 1,9 Mo, 4’05")
ou bien
Extrait pour goûter (410 ko)
Bonus : ouvrir une fenêtre avec les Paroles

Guitare : Louis Bertignac
Piano & chant : Lionel Lumbroso

À Noter :
1er couplet, puis refrain à 48". Louis souligne opportunément la transition entre couplets de 54" à 1'11" puis se fait un peu plus présent au 2e couplet. 2e refrain à 1'40" et début du solo de Louis à 2'05" après annonce de transition. Sa guitare raconte une histoire, on a l'impression qu'elle parle, puis, au passage en Do, à 2'28", qu'elle pleure avant de crier à 2'37" avant d'enfourner le refrain et une descente élégante en bending pour redonner la main au chant à 3'. Dernier couplet et conclusion à partir de 3'33".

 

1977 – As (S. Wonder) (Mono 64 kbit/s, 3,1 Mo, 6’42")
ou bien
Extrait pour goûter (400 ko)
Bonus : ouvrir une fenêtre avec les Paroles

Guitare : Louis Bertignac
Piano & chant : Lionel Lumbroso

À Noter :
La chanson commence par 2 couplets de suite, puis passe à un refrain prolongé à partir de 59" sur lequel le chant se conclue par un long « Alwaaaaaayyys » de 1'39" à 1'50" qui lance la guitare sur le même thème. Louis fait tout de suite assez fort et maintient bien son propos par la suite. À 3'13", je distingue un signal pour reprendre le chant, je reprend, je crois qu'il a fini, mais tu parles ! il reprend de plus belle, l'enragé! À 4'20", c'est bien le moment du dernier couplet, avec grosse présence de la guitare, qui repart seule à 5'20" et prépare, à partir de 5'50", une fin qu'on choisit de traiter en ralentissant.

 

1995 : Ze Great "Wedding" Comeback Concert

Lionel Blévis, Louis et moi n’avons jamais vraiment perdu le contact et en 1995, après avoir mis peut-être encore plus de temps que les autres attardés de cette génération à se décider question mariage, Blévis nous appelle en nous annonçant que ça y est, c’est décidé, ça va se faire, avec Corinne H. (qui est en fait une de ses copines d’il y a 25 ans !). Vu le temps qu’il a mis à se décider, il souhaite faire les choses a la grande, louer une belle demeure ancienne à la campagne 24h pour l’occasion et il veut qu’on fasse ensemble un concert après le grand dîner ! Ouaaiis, on va s’éclater ! ;)

Comme batteur d’un soir, je propose Pierre Azagra, qui a bien assuré la fonction en alternance avec Emmanuelle Lavau dans « Lumbroso & Compagnie » l’année précédente (on en reparlera à l’Épisode 5). Pierre est un chevronné de la reprise 70s, son jeu est fin, il est ravi de la proposition et il va s’avérer, comme je le pensais, un excellent choix pour l’occasion.

Je vous propose un morceau du soir du mariage et un autre tiré d’une des deux répétitions qui l’avaient précédé de quelques jours, qui donnent une bonne idée de ce qu’on faisait 20 ans auparavant. « Brown Sugar », ça faisait partie des 8 ou 10 morceaux des Stones qu’on faisait régulièrement, et c’est probablement le plus emblématique avec « Midnight Rambler », comme ça a dû être le cas pour des milliers de rockers de France et d’ailleurs !

1995 – Brown Sugar (Jag.-Rich.) (Stéréo 128 kbit/s, 3,3 Mo, 3’35")
ou bien
Extrait pour goûter (520 ko)
Bonus : ouvrir une fenêtre avec les Paroles

Guitare : Lionel Blévis
Guitare & chant : Louis Bertignac
Basse & chant : Lionel Lumbroso
Batterie : Pierre Azagra

À Noter :
C’est moi qui chante les 2 premiers couplets et refrains avec harmonies de Louis. Après un très court solo de Louis de 1’58 à 2'10", c'est lui qui reprend le chant du refrain et du dernier couplet et moi qui lui fait les harmonies. Notre fin est un peu "petite", unfortunately, mais bon, un Brown Sugar, ça fait toujours du bien ou ça passe !

Quelques jours plus tôt, en répétition, on s'était bien amusé, et la version ci-après de « Taxman », des Beatles, interrompue avant la fin pour cause de gueulante de Louis et moi et débutant par des dialogues donne une assez bonne idée de l’ambiance. ;) Disons aussi qu’elle est dédiée à la mémoire de Georges Harrison...

1995 – Taxman (G. Harrison) (Stéréo 128 kbit/s, 2,6 Mo, 2’51")
ou bien
Extrait pour goûter (460 ko)
Bonus : ouvrir une fenêtre avec les Dialogues & paroles

Guitare & chant : Lionel Blévis
Guitare & chant : Louis Bertignac
Basse & chant : Lionel Lumbroso
Batterie : Pierre Azagra

À Noter :
Bon, on va arrêter de noter des trucs, on va écouter et rigoler, éventuellement en cliquant sur le lien ci-dessus « Dialogues et paroles » pour mieux suivre l’action. ;)

 

Ben alors t’as failli être dans Téléphone et t’as foiré ?

Ah, il fallait qu’elle tombe, celle-là, tu veux pas me lâcher, avec ça ? ;) Bon, c’est vrai que j’ai eu droit à ce genre de réflexion pas mal de fois, alors autant la traiter ici !

D’abord, le Téléphone qu’on a connu, c’était avec Corine et elle n’y tenait pas une petite place ; sans elle, ça n’aurait pas été le même groupe et peut-être une autre formule n’aurait-elle pas été aussi réussie.

Ensuite, je n’étais pas tout à fait aussi prêt que mes camarades à m’engager à fond dans la musique, j’avais le sentiment diffus que je devais passer par autre chose avant. J’assume cette attitude et ne souhaite pas faire preuve de futilité en la regrettant parce qu’il s’avère, a posteriori, que mes copains ont excellemment réussi, ce dont je me réjouis au plus haut point.

Tiens, je vais raconter une anecdote qui, in fine, règlera peut-être la question : courant 1976, Jean-Louis sollicite Olivier Caudron et moi pour nous demander de faire une ou deux « répétitions » à la cave de la maison communautaire de Saint-Cloud avec Richard, « pour voir ce que ça donne ». On joue et tout se passe évidemment très bien — on se connaît par cœur. Mais c’est sûr qu’Olivier et moi nous voyons aussi, sans aucun doute, dans un rôle de leader-chanteur, et 3 leaders-chanteurs, dans un groupe, ça fait trop, voilà tout.

C’est une alchimie délicate qui peut mener à une aventure comme celle de Téléphone, faite de hasards, de déterminismes, de volonté des uns, de volonté des autres... En l’espèce, les circonstances ont fait qu’un concert au Centre Américain de Paris, prévu de longue date pour le groupe intérimaire de Jean-Louis, Semolina, s’est transformé en concert fondateur, notamment grâce à l’énergie déployée par Richard Kolinka dans ce sens.

Pour moi, les choses ont été plus graduellement. Depuis plus de 15 ans, avec Louis, on se dit plaisamment de temps en temps, « Ben, p’têt qu’on refera un groupe ensemble vers 50-55 ans ». Il se trouve que l’échéance approche, et que je compte bien l’honorer. :)

-= Janvier 2002 =-


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Lettre du syndic au sujet de "la cave"
(Cliquez pour agrandir)











Louis chez mes parents, 1973



















Mon frère Philippe en 1972,
à 17 ans, avec sa basse Jacobacci










Je descends la rue de Courcelles avec ma basse pour aller chez Louis, en 1973. Notons avec attendrissement les gros favoris, le sac en laine marocain en bandoulière et la main accrochée par le pouce à la poche droite du jean, traits caractéristiques de l'époque !










Portraits croqués de Louis, Jean-Louis et Bernie par un copain de Bernie
(invité à se faire connaître pour être justement crédité ;)











Jean-Guillaume













Liste de morceaux pour un concert vers 1973




















Corine en 1971














Alain Broda
était l'un des seuls de cette bande à prendre des photos à cette époque et un certain nombre des photos présentées ici sont de lui. Mon frère et moi l'avions connu au lycée Carnot. C'était le contrebassiste de la bande, mais il avait aussi une basse électrique Fender Jazz Bass. Nous rejouons assez régulièrement ensemble depuis 4-5 ans avec un plaisir certain.


















Oh, c'est bien flou, ça ! On distingue tout de même Louis au 1er plan avec sa Galanti qui, à l'époque était noire (elle a été également blanche et violette !). Dans le fond, je suis habillé "Deschiens" 25 ans avant la lettre, avec chemise à carreau et pull débardeur à rayures !















Jean-François Favart
dit « JF », était un copain de lycée de mon frère, avec qui il jouait de la batterie alors qu'ils étaient encore en 4e ou en 3e ! Nous avons fait nos grands voyages « hippie » ensemble, le Maroc en 1972 (cette photo), puis l'Inde et le Népal en 1973. Par sa mère, Nicole, JF était rentré dès 1972 chez WEA France, il s'occupait du répertoire anglo-saxon et chaperonnait tous les grands groupes qui venaient en France, faisait avec eux la tournée des grands ducs, etc., grande classe ! Au bout d'une douzaine d'années, les choses se sont un peu gâtées et après le pain très blanc, il a goûté un certain temps à un pain plus noir, mais les choses se sont arrangées. D’ailleurs vous avez vu la beauté « canon Méditerrannée » de ce garçon, hein ? Qu’est-ce qui peut arriver de durablement pourri à un prince pareil ? ;)






































Premier 45 T autoproduit enregistré lors d'un concert au Bus Palladium






Etiquette intérieure du 45 T





On va pas se quitter comme ça !

Tu as participé de près ou de loin à cette aventure ? Tu as une question ou un témoignage s'y rapportant ?

N'hésite pas à
m'écrire.

[ci-contre]

Emission "Canal Dimanche" de décembre 1996

Louis, moi et Lionel Blévis entourons la fort chaleureuse Valérie Payet, tandis qu'autour du tout à la fois drôle et docte Philippe Dana se tient l'autre équipe, avec Marie Trintignant (aussi radieuse à la ville qu'à l'écran), son compagnon Samuel Benchetrit, metteur en scène et poète, et la joyeuse Zoé Chauveau.

Avec un peu de retard (!) : merci beaucoup à Valérie et à Philippe pour cette sympathique photo, et... bonne année 2002 !


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